dimanche 17 avril 2011

Chronique brésilienne, la suite

En discutant avec ma famille adoptive, j’ai réalisé à quel point elle n’a rien à voir avec la pauvreté que je côtoie dans la rue. Foutrement aisée. Lui, Magno, un propriétaire de banque. Elle, Gisele, bibliothécaire au Musée d’art moderne de Bahia. Avec eux vivent leur fille, pratiquement inexistante, la grand-mère (qui, note à part, du haut de ses 4 pieds était fière de lever son gilet à 2 pouces de ma face l’autre jour pour me montrer son nouveau pacemaker… Ta bom Ta bom… ça surprend sur le coup) et la dona-dont-je-ne-sais-pas-le-nom, une fidèle femme à tout faire qui oeuvre dans cette demeure depuis plus de 15 ans. Discrète et souriante. Et comme je me découvre souvent une curiosité pour les personnages d’arrière-scène, les oubliés qui très souvent font que ça roule rond et pas carré, je lui fais la conversation le matin à mesure que j’engouffre les festins matinaux qu’elle me prépare. Elle concocte de ces déjeuners la dona, ouaahhh ! Fruits frais, beignets locaux, gâteau moelleux au beurre et chocolat, fromage, œufs, petits pains, tourte au poulet et j’en passe. Je tente d’aligner quelques mots en portugais en sa compagnie, ma façon très personnelle de la remercier pour le réconfort gustatif apporté par ses plateaux fraîchement sortis du four chaque matin. Langue fourchue et assimilation ardue en cette première semaine. Nao fàcil portugese. Mais j’ai trouvé quelques trucs pour m’octroyer un répit. Exemplo. Lorsque mon cerveau a besoin de mâcher les mots légèrement plus longtemps, je prends une gargantuesque bouchée à même les denrées de mon assiette. Exercice de visualisation lecteurs… c’est bon ? Ok on poursuit. Mon p’tit dej a le dos large. Nourrir la panse et l’esprit. Énergie alimentaire comme moteur de réflexion. Les papilles sécrètent fort. Eu penso, Eu penso.

Qui aurait cru qu’en venant à Salvador, c’est à la rencontre de Rodin et de quelques-unes de ces sculptures que je viendrais. Un travail de titan complexe et incarné, à l’image de l’anatomie humaine. Un raffinement qui dépasse l’entendement. Une pièce a retenu mon attention : Le sculpteur et sa muse, une représentation iconographique de cette relation fusionnelle qui unit le créateur et son inspiration dans sa forme terrestre. Une expo présentée au Palais des Arts de Graça, un véritable « palais » aux influences architecturales jésuites et à la peau couleur de lait. Je glisserai un mot sur comment nous sommes y sommes arrivés : Oito pessoas no taxi. 2 dans le coffre arrière, 4 sur la banquette et 2 sur le siège avant. Je venais tout juste de faire la connaissance d’Eva, une étudiante suédoise de la classe d’à côté et une heure plus tard, j’étais assise sur ses genoux, la tête dans l’windshield. C’est ce qu’on appelle devenir rapidement up close & personal.

Je glisserai également un mot sur ma visite chez un joaillier privé. Les gisements s’exploitent par centaine dans l’état de Bahia et l’extraction des pierres précieuses est une industrie montante extrêmement lucrative au Brésil. Résultat : les prix sont plus qu’abordables et l’histoire du commerçant passionné qui nous reçoit digne d’écoute.

Plusieurs mots sur ma soirée en compagnie de Lamine, Moema et Milo. Moema et Milo, frère et sœur dont la mère est une réputée artiste octogénaire de Bahia, possèdent un appartement cossu qui arrache des « oh !» et des « ah !». 3 cuisines, de l’art mur à mur, des bouquins par centaine et une vue étoilée en cette nuit naissante. Au diable les armoires de cuisine. Ici c’est des walk-ins de vaisselles en porcelaine. Tout ça dans le quartier bohémien de Rio Vermelho où nous avons mangé de la Moqueca préparée par Milo. Profession : cuisinier.

Non mais tsé, t’es bourgeoise ou tu l’es pas !

C'est ainsi que la journée a débuté. Les nuages et le soleil se disputent l’azur pendant que mes orteils se délient à Praia do Farol da Barra. Até logo.

4 commentaires:

  1. Vivent tes tranches de vie! C'est ça qui m'intéresse, mes voyages je les vis comme toi, à travers les acteurs éphémères aux rôles seconds. Et je crève d'envie en lisant ta visite chez Lamine, Moema et Milo. Jackpot de délices visuels, intellectuels et gustatifs!
    Grosses bises fraîches...

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  2. Le Brésil, c'est vraiment un monde coupé en deux. Et il est difficile d'avoir accès au 2e Brésil, celui qui est, à mon avis, le plus intéressant.

    Bonne chance, sincèrement! Magique chance...

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  3. Je ne pourrais être plus d'accord. Je les cherche ces opportunités, au détour des rues, dans les regards de saudade. En solo, un peu plus facile d'y avoir accès, mais tout de même difficile. J'ai eu l'impression d'entrouvrir momentanément le rideau hier après fait la rencontre d'un quinquagénaire brésilien sorti de nul part. Nous avons jasé, pris une bière, il me raconte que sa femme vit à l'asile, a perdu la tête, il semble affecter (par quoi pas très sûr, la tristesse ou le crack), il me chante des sérénades. C'est ça la beauté du monde de la rue. Des personnages plus grands que nature qui vous servent leur coeur sur un plateau.

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  4. haa moi tu me connais, je laisse faire les belles phrases poétiques et mon côté rationnelle te dis: C'était un pur étranger batard!!! Fait attention!!!!!!!!!!! soit prudente minoune!XXX
    Il doit en avoir des amies comme moi qui ramène à la réalité!!! ;) lol :)
    Julie

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